Le Centre Culturel Jean-Cocteau invite l’artiste franco-bosnienne Maja Bajevic (Sarajevo, 1967) à présenter Echos, sa première exposition personnelle dans une institution publique française. Artiste de renommée internationale, Maja Bajevic se réfugie à Paris lors du conflit yougoslave au début des années 1990. Cette épreuve anime chez elle une profonde réflexion sur la construction politique des identités et les fractures sociales et historiques de notre temps. D’artiste exilée, elle devient artiste nomade vivant entre Paris, Berlin, Venise et Sarajevo.
A travers la performance, la vidéo et l'installation, elle tisse son expérience avec des histoires individuelles et collectives pour construire une mémoire commune. Les œuvres existantes et celles produites spécifiquement pour Echos portent les voix de résistant.es et de victimes des répressions du XXème et XXIème siècle dans un hymne à l'humanité. A travers un travail de recherche et de collecte dans les archives et les médias, Maja Bajevic compose une polyphonie de récits, invitant le visiteur à les découvrir en traversant une succession d'environnements qui le plongent dans une expérience à la fois intime et collective, physique et mentale. Elle crée un espace où les paroles étouffées par le(s) pouvoir(s) s'entremêlent, résonnent et se réactivent mutuellement. Le corps du visiteur en devient la caisse de résonance, à la manière de la chorale gospel du Centre Culturel Jean-Cocteau, avec laquelle l'artiste a travaillé lors d'une résidence, et qui incarnera dans une vidéo les voix plurielles de l'exposition.
Des mélodies de chants révolutionnaires rappellent la possibilité d'un avenir différent. Des résistantes emprisonnées par la Gestapo ont témoigné de leur quotidien sur les murs de leurs geôles, par des graffitis aujourd'hui menacés de disparition. L'artiste les illumine sous forme de néons. Parmi ces derniers, un parachutiste autrefois gravé sur le mur d'une cellule de prison de Paris par des membres de la France libre est installé à l'entrée du fort de Romainville, ancien camp d'internement de plus de 7000 détenus politiques. De témoignage historique, il devient le symbole lumineux de ces trajectoires rapprochées par le vent de l'histoire.
La distance géographique et temporelle des vies qui nourrissent les œuvres de Maja Bajevic se voit annulée par l'écho commun qui en émane, faisant de l'exposition un espace poétique de rencontre, d'activation de mémoire et de réflexion collective. Les violences policières systémiques dénoncées partout dans le monde et aux Etats-Unis par le mouvement Black Lives Matter se lisent dans les derniers mots prononcés par George Floyd brodés sur des draps de lin. Ces broderies rassemblent les destins de victimes qui souffrent encore de la discrimination et des systèmes d'oppression à l'instar des personnes LGBTQIA+ dont le taux de suicide augmente toujours plus, notamment face au harcèlement sur les réseaux sociaux. De la pénombre à la lumière, du bruit au silence, de l'enfermement à l'ouverture, le visiteur rencontre les traces d'existences qui refusent de se faire oublier.